De l’autogestion à l’Economie Sociale et Solidaire
Mon compagnonnage avec Michel Rocard est ancien. Il date de ces élections législatives de 1969 qui lui permirent d’obtenir son premier mandat de député dans les Yvelines. C’est la nouveauté du projet qu’il portait qui nous avait engagés avec quelques amis à faire campagne pour lui. Le goût de la liberté, de la justice et de la vérité qui furent sa marque tout au long de sa carrière politique furent déterminants pour nous, chrétiens, qui recherchions un engagement à la fois exigeant et réaliste. Il bousculait une gauche trop préoccupée de questions politiciennes en offrant une vision novatrice et réellement transformatrice de la société française. La société fraternelle dont il rêvait était notre aspiration commune. Cela est resté vrai tout au long des années.
A ses détracteurs qui l’accusaient d’être un utopiste il opposait la rigueur de ses analyses économiques et sa parfaite connaissance de l’Histoire. Sa brillante intelligence et son talent de conteur rendaient chaque moment de travail commun à la fois plaisant et stimulant. J’ai beaucoup appris avec lui. Récemment encore lors de la remise de la grand croix de la légion d’honneur par François Hollande, nous avons tous été saisis par la façon maitrisée et juste dont il retraçait l’histoire politique de ces cinquante dernières années. …sans oublier l’humour qu’il maniait avec talent !
Son « parler-vrai », qui ne lui fit pas que des amis, va manquer à la Gauche ! Et avec lui la capacité d’innovation et le courage de la mettre en pratique.
Nous lui devons des réformes aussi importantes pour la vie des Français que le RMI ou la CSG, dont personne ne met en doute la pertinence, et je peux en témoigner, une vision nouvelle et dynamique de l’économie sociale et solidaire, dont il fut le premier responsable politique à en comprendre l’importance transformatrice face à un capitalisme de plus en plus vecteur d’inégalités, lorsqu’en 1981, il obtint, au forceps, d’en êtrre chargé. Je l’ai accompagné sur ce terrain depuis lors.
L’an dernier, avec Henri Madelin, Pierre Yves Cossé, et moi, Michel voulait lancer un appel aux spiritualités pour redonner du sens à nos sociétés. Mais il laisse cette aspiration inachevée.
Aujourd’hui est un jour de tristesse car, pour tous ceux qui l’ont suivi, c’est la fin d’une histoire,. Mais aussi un jour de fierté. Fierté d’avoir vécu une aventure qui avait de « l’allure » même si elle ne fut pas totalement aboutie.
Si beaucoup d’entre nous ont le sentiment d’avoir perdu un « père » c’est de père spirituel qu’il faudrait parler…
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