Hommage à Michel Rocard de Dominique de Combles de Nayves

Imprévu

 

Jeune auditeur à la Cour des Comptes, j’ai rejoint le cabinet politique de Michel Rocard dès ma sortie de l’Ecole aux cotés de Dominique Perreau et de Marisol Touraine, aidé par la formidable Mercedes Quesada.

 

J’ai eu la charge pendant trois ans d’organiser les voyages internationaux de Michel et de l’accompagner : Italie, Belgique, Espagne mais surtout le voyage mémorable en Grande-Bretagne où, à Londres nous avons rencontré Margareth Thatcher, oui la Madame Thatcher ! Tout a commencé sous les meilleurs auspices mais à quelques encablures du 10 Downing Street, Michel perdait un des boutons de sa veste et nous voilà avec le protocole en train de chercher le précieux objet sous la banquette du véhicule qui nous transportait. Imperturbable l’agente du Foreign Office après avoir récupéré le précieux bouton sortait sa trousse d’urgence et le recousait, tandis que Michel, toujours angoissé d’être en retard ouvrait déjà la portière.

 

Puis ce fût le charmant accueil accompagné de cookies et de ce breuvage inimitable que les anglais appellent Thé et que bien entendu, Rocard refusa poliment en demandant une tasse de café noir bien fort. Margareth Thatcher évoqua la présence anglaise à Calais.. dont elle rappela l’origine… déjà prémonitoire pour un clin d’œil à la jungle actuelle. Elle traçait de façon précise sa conception de l’Europe. Michel lui a répondu sur un ton courtois mais ferme que nous ne partagions pas la même vision, qu’il respectait la sienne mais qu’il entendait qu’elle respecte la nôtre.

Ils se séparèrent après l’évocation par Michel de la formidable aventure navale que fut l’expédition pour les Malouines. Le salut d’un marin !

 

Puis ce fut le départ en petit avion pour Lille où se tenait le premier meeting de la campagne de François Mitterrand. Michel s’était effacé mais il était attendu par Pierre Mauroy dans ce qui était prévu comme étant une réunion monstre où tous les socialistes européens notamment les Wallons et Flamands seraient réunis.

Las nous n’avions pas prévu une météo aussi exécrable, un atterrissage aussi périlleux, un magnifique retourné sur l’aile, quelques bruits de vaisselle de la délicate porcelaine de Wedgwood que le journaliste Rachid Arhab avait achetée pour son épouse. Toujours aussi discret, il se montra peu disert sur l’état exact de son cadeau !

 

Nous voilà en route pour la salle du meeting, un peu cabossés et les vêtements chiffonnés sans pouvoir repasser se changer. Heureusement, la chaleur de l’accueil et du meeting permit à Michel d’entrer fièrement dans la salle d’un pas assuré, peut être celui du futur premier ministre.

De retour de grand matin à Paris, cette fois-ci sans incident, je compris au coup de téléphone matinal qu’il recevait dans sa voiture qu’il y aurait quelque chose qui allait se passer bientôt entre lui et François Mitterrand.

 

Avec Michel Rocard c’était toujours comme ça, des grandes fresques sur l’Europe ou sur le Monde, un souci du détail, la chaleur humaine et l’anxiété de ne pas être toujours parfait.

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