Veuillez trouver ci-dessous ma tribune qui vient de paraître dans la revue du Trombinoscope n°203 -Avril 2016 :
En octobre 2013 le Président chinois Xi Jinping a annoncé La création de la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures (BAII). Son périmètre d’action se limitera aux transports, à l’énergie, à l’eau et à l’assainissement, puis s’étendra à d’autres domaines la protection de l’environnement, le développement urbain, ou les TIC.
Le capital de la BAII, d’un montant proche de 100 milliards de dollars, doit être utilisé de manière à créer les conditions d’une intégration économique régionale plus poussée.
La France, qui a rejoint le groupe des membres fondateurs en avril 2015, détiendra 3,37 % du capital, soit 3 375 millions de dollars et 3,19 % des droits de vote totaux des membres de la Banque (11,9 % des droits de vote des membres non-régionaux). Il y 57 Etats fondateurs dont 20 n’appartenant pas à la région. Les États-Unis, le Canada et le Japon sont pour l’instant restés à l’écart, même si la position américaine semble s’être infléchie suite à la visite du président chinois Xi Jinping.
La France a activement participé aux cinq dernières réunions de négociation en vue de la création de la BAII ainsi qu’aux différentes procédures de consultation, apportant l’expertise de la Direction générale du Trésor, du MAEEI et de l’Agence française de développement.
Une forte coordination s’est en outre mise en place entre les 17 pays fondateurs européens de la BAII, autour d’un noyau dur de six pays : Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie, Pays-Bas et Suisse. Cette coordination a permis de porter une position unifiée plus forte. Sur plusieurs sujets, le rôle de la France a été déterminant.
Pour les décisions importantes, la France a obtenu que la majorité nécessaire permette aux pays non-régionaux de bénéficier d’un droit de véto : la Chine a réduit sa participation au capital de 50 % à 30 %, son pouvoir de veto se limitant désormais aux sujets requérant une majorité qualifiée (sujets concernant le CA par exemple). Échappent en revanche à la majorité qualifiée, et donc au veto chinois, des sujets tels que l’admission de nouveaux membres et la plupart des décisions de prêts.
La gouvernance de la banque repose principalement sur le Conseil des gouverneurs, composé d’un gouverneur par pays membre ; et le Conseil d’administration, composé de douze membres, dont deux européens et un troisième « non régional », responsable de la direction des activités générales de la Banque.
Absents à l’origine, le « Développement durable », les droits de l’Homme, l’interdiction du travail forcé et le travail des enfants, les conclusions de la Conférence de Paris sur le climat (COP21) sont autant d’éléments qui ont été insérés dans le texte actuel.
La BAII est désormais une institution plus ouverte, et multilatérale. Tout en n’étant pas un outil au service de la politique régionale de la Chine, elle permet à cette dernière de mieux s’insérer dans le concert des institutions internationales, à la mesure de son poids économique et politique.
La France, avec ses partenaires européens, a choisi de participer activement à ce processus, dans lequel elle a vu une double opportunité :
- Celle de contribuer activement au développement du continent asiatique, ce qui est déjà le cas de nombreuses entreprises françaises, et constitue en outre l’un des objectifs de notre politique d’aide au développement ;
- Celle de contribuer à une meilleure insertion de la Chine au sein des politiques de développement et d’entrer dans une logique de coopération plutôt que de concurrence dans ce domaine.
La création de la BAII est profitable à notre pays car elle acte la montée en puissance de la Chine tout en s’assurant que son développement sera profitable à l’ensemble de la région à laquelle elle appartient. Elle est aussi profitable parce qu’elle offre à la France de nouveaux horizons pour sa politique d’aide au développement.
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