Réforme fiscale : Fusion CSG – IR par Roger Godino

Roger Godinos

godino.roger@wanadoo.fr                                                             Le 12 décembre 2013

 

 

Réforme fiscale – Fusion CSG – IR

 

 

la fusion CSG – IR est considérée comme une pièce maîtresse de la réforme proposée par la gauche.

L’erreur serait de sous-estimer les difficultés pratiques de réalisation qui font que cette réforme ne pourra se faire au mieux que sur plusieurs années. Les objections théoriques et pratiques sont nombreuses qui, à ma connaissance, n’ont pas reçues à ce jour de réponses satisfaisantes.

 

            1/ la principale difficulté pratique vient du fait que la CSG est un prélèvement à la source des revenus alors que l’IR est payé de façon  différée par le foyer fiscal. Il faudrait donc d’abord transformer l’IR pour le prendre à la source ce qui est en soi très complexe.

 

                         –  Passer du foyer fiscal à l’individuel signifie pour tous les couples la décomposition en deux de leur impôt, un impôt pour chaque membre du couple. Dans la mesure ou l’IR reste progressif, on voit qu’il sera difficile de ne pas faire des gagnant s et des perdants, sauf si on se met dans l’hypothèse peu probable d’une baisse massive de la fiscalité des revenus.

                         –   Cela signifie aussi que l’on abandonne tout coefficient familial. On abandonnera ainsi une fiscalité favorable aux familles pour une fiscalité favorable à l’individu. C’est un problème politique explosif. Est-on prêt à l’assumer ?

                         –  Le passage de l’IR du foyer fiscal à l’IR individuel signifie que l’année du changement chaque contribuable paiera deux fois son impôt, une fois pour l’année en cours et une fois pour l’année précédente. Comment effectuer la compensation ? Le risque technique n’est pas négligeable.

                        En résumé, le passage d’un système à l’autre est d’une grande complexité à la fois politique et technique. Mais c’est une réforme possible si le pouvoir politique le veut.

 

            2/ la fusion sera ressentie in fine comme une augmentation de l’IR et une disparition de la CSG. Le financement de la sécurité sociale sera ressenti comme fragilisé, ce qui explique que cette réforme  inquiète, à juste titre, les partenaires sociaux qui sont attachés à la sécurité sociale.

 

            3/ la CSG est un prélèvement dont l’objectif est très bien perçu et qui est ressenti plus comme une cotisation que comme un impôt et son taux unique en fait, en quelque sorte, une prime d’assurance contre la maladie mais qui est proportionnelle au revenu de chacun, ce qui représente déjà un effort de solidarité. En effet, pour le même service rendu le contribuable cotisant paie deux fois plus cher si son revenu est deux fois plus élevé, ce qui est bien une forme de forte progressivité. Si on veut la rendre progressive en taux de prélèvement elle sera évidemment mal acceptée par les classes moyennes. Il est à craindre qu’au hasard des alternances politiques inévitables, elle subisse la même évolution que l’IR. Bref, ce prélèvement risque d’être largement moins accepté que le prélèvement CSG actuel pour un rendement donné. Les syndicats ont bien raison de s’en méfier. Rendre le taux de la CSG progressif est lourd de conséquences politiques explosives.

 

            En conséquence, si le législateur tient absolument à faire la fusion, il serait conseillé de procéder par étapes :

 

            1ère étape : ne rien changer à la CSG et faire de l’IR un impôt prélevé à la source. On en profitera pour reprofiler L’IR en fonction d’objectifs politiques : alimenter les finances publiques de l’état et réduire les inégalités de revenu. Ce simple chantier ne pourra se réaliser qu’en deux ou trois ans au milieu d’innombrables difficultés que connaissent bien les fiscalistes, et dont certaines sont décrites plus haut.

 

            Mais ce serait quand même une modernisation du système fiscal : en soi une véritable révolution. On devrait en profiter, d’ailleurs pour examiner ce que font les autres pays européens pour se préparer à une inévitable harmonisation fiscale européenne.

 

            2ème étape : on pourra faire un seul prélèvement à la source appelé CSG-IR dont les deux parties restent très individualisées sur les feuilles d’impôts, chacun sachant ce qu’il paie pour le social (CSG) et ce qu’il paie pour le budget de l’état (IR).

            On pourrait en rester là. Et la révolution fiscale que représentent ces deux étapes n’est pas négligeable.

 

            3ème étape : on peut rendre alors la CSG progressive ce dont on voit mal l’avantage puisque l’effet de progressivité recherché pourrait être entièrement concentré sur l’IR. Au contraire une progressivité du taux de la CSG la rendra plus fragile politiquement. C’est une mesure dangereuse pour la pérennité du financement de la Sécurité Sociale.

 

            En fait, la fusion CSG-IR est une fausse solution au problème bien réel de la nécessité de réduire les inégalités de revenu. N’oublions pas qu’un bon impôt est un vieil impôt d’un bon rapport  et bien accepté par le contribuable.

 

            La CSG est un vieux prélèvement (1990), d’un bon rapport et très bien accepté. N’y touchons pas.

 

            En tout cas on voit mal ce que pourrait être le bénéfice politique de l’opération. Les risques, eux, sont bien réels.                                                                             

 

 

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